La postvention et Lignes de conduite pour les médias

Dernière révision : Le 06 septembre 2024

Lorsque quelqu’un se suicide, l’effet sur ceux qui sont touchés peut-être immédiat et traumatisant. La recherche nous apprend que la planification peut apaiser le deuil, promouvoir une adaptation plus harmonieuse et prévenir la contagion.

Les praticiens s’entendent sur des moyens efficaces pour réagir à un décès par suicide. En s’inspirant de ces moyens, qui sont pensés pour les organismes du secteur public, du secteur privé et du secteur des organisations à but non lucratif, Prévention du suicide Ottawa se penche sur ce qu’il faut faire lorsqu’un enfant, un adolescent ou un jeune adulte se suicide. L’information et les vidéos diffusées sur ce site Web sont destinées à assurer le complément et l’appoint des politiques et des procédures existantes.

Qu’est ce que la contagion?

La recherche a permis de cerner un phénomène appelé la « contagion suicidaire ». Ce phénomène tient à l’idée qu’un individu qui a déjà des pensées suicidaires et qui est exposé à un suicide ou qui apprend que quelqu’un s’est suicidé est plus susceptible de passer à l’acte selon les facteurs qui composent sa suicidabilité. Si par exemple un individu qui a déjà des idées suicidaires constate ou entend dire qu’un ami, un être cher ou une idole s’est suicidé, il est plus probable qu’il agisse lui aussi d’après ses propres idées suicidaires. La planification aide à réduire le risque de contagion, à entamer le dialogue avec les êtres chers, à connaître l’impact qu’ils subissent et à se préparer à les aider.

Qu’est ce que la postvention?

La postvention vise à reprendre la routine après un suicide. Pour ce faire :

  • il faut à la fois aider la communauté à cerner les besoins;
  • miser sur les aides naturelles et sur les facteurs de protection;
  • apporter de l’aide en cas de crise ou des moyens d’aide psychologiques ou psychosociaux ou recommander les ressources appropriées à ceux qui en ont besoin et;
  • faire appel à d’autres formes d’aide pour permettre les gens de reprendre du mieux.

Pour prévenir la contagion, il est important d’agir en connaissance de cause à chacune des étapes de ce processus. Il faut réfléchir au choix de la personne qui donnera l’information et au moyen grâce auquel elle sera communiquée. Idéalement, il faut déjà avoir l’expérience de mener une postvention et avoir des liens solides avec les personnes qu’il faut épauler. Il faut demander au besoin l’aide d’un organisme voué à la santé mentale durant cette phase.

Pendant toute votre postvention, pensez à tous ceux et à toutes celles qui pourraient être touchés, à leurs besoins et à ceux qui ont l’expérience, les compétences et les relations leur permettant d’offrir de l’aide. Il faut entre autres se demander qui peut aider les employés au sein de l’organisme qui coordonne la postvention.

Suicide postvention vidéo (en anglais seulement)

La planification avant la crise 

Cette planification est importante, puisque dans la foulée d’un suicide, quand les émotions et les tensions sont fortes, il est très difficile de réagir sans d’abord adopter de lignes de conduite ou de plans.

Ceci dit, il est important d'identifier les personnes responsables de la planification et de la mise en œuvre de la postvention avant qu'un suicide ne se produise.

Différentes directions générales, différents employés et différentes organisations communautaires sont responsables du déploiement des aspects du plan de postvention. Dans la planification de la postvention, il faut insister sur l’importance de la communication et de la coordination des organismes en cause.

Les questions à poser dans la mise au point de votre plan de postvention
  • Qui doit faire partie de l’équipe d’intervention d’urgence au sein de l’organisme? Qui peut prendre des décisions dans l’immédiat? Qui peut prendre le temps d’y participer à bref préavis?
  • Quelle formation faut-il suivre pour réussir dans ce rôle? Où peuton avoir accès à cette formation?
  • Quelle information des différents secteurs de votre organisme doivent ils connaître d’avance sur le plan de postvention? Quel est le meilleur moyen de donner l’information?
  • Comment prendrez-vous connaissance des suicides survenus ou comment les recenserez-vous?
  • Quelles sont les ressources à votre disposition pour vous aider?
  • Comment pourrai ton les concerter dans le cadre d’une intervention unifiée?
  • Quels protocoles de postvention appliquez vous à l’heure actuelle? Par exemple, avez vous une stratégie de communication avec les médias à laquelle vous pouvez faire appel en cas de suicide? Avez vous un protocole pour dépister les élèves et les étudiants à risque après un suicide?
  • Quelles sont les considérations pratiques sur lesquelles il faut se pencher? Par exemple, pour les services résidentiels, qui s’occupe d’emballer les effets personnels dans la chambre d’une personne décédée?
  • Dans un processus d’examen, consultez votre personnel sur le déroulement de l’intervention menée en cas de décès ou de suicide d’élèves ou d’étudiants. Où y avait-il des lacunes? Quelles ont été les difficultés?

En savoir plus sur la manière de constituer votre équipe de postvention (vidéo, en anglais seulement).

Parler à un soignant après un suicide

En votre qualité de fournisseur de services, vous êtes sans doute celle ou celui qui, dans votre organisme, est chargé(e) de contacter les parents ou les tuteurs de l’enfant, de l’adolescent ou du jeune adulte qui s’est suicidé.

Avant le contact

Demandez-vous si d’autres organismes ont déjà pu annoncer la nouvelle. Il pourrait s’agir de l’Unité de soutien aux victimes du Service de police d’Ottawa, du conseil scolaire ou d’autres organismes.

Assurez-vous que la famille ne reçoit pas différents appels de la part de ces organismes.

Quand vous faites l’appel :

  1. Offrez vos condoléances.
  2. Demandez-vous quels sont les autres enfants, adolescents ou jeunes adultes qu’il faut informer.
Pendant l’appel
  • Expliquez la raison de votre appel.
  • Renseignez-vous sur les groupes ou les personnes qui pourraient être touchées elles aussi (par exemple l’équipe de hockey, le lieu de travail ou la famille élargie).
  • Quels sont les autres enfants qui pourraient être touchés par la nouvelle du décès de votre enfant? Votre enfant faisait-il partie de groupes récréatifs ou sociaux qu’il faut informer?
La demande de consentement
  • Demandez à votre interlocuter comment il souhaite que l’on donne l’information à ces groupes d’enfants, d’adolescents ou de jeunes adultes.
  • Voulez-vous que nous appelions pour vous les différents organismes en cause?
  • Comment voulez-vous que nous parlions du décès de votre enfant? Devrions-nous simplement dire qu’il est décédé ou pouvons-nous dire qu’il s’est suicidé?
Pour aider à manœuvrer et à donner des conseils dans les prochaines étapes
  • Donnez des conseils à propos des moyens d’apprendre la nouvelle aux autres enfants (amis, cousins ou cousines et frères ou sœurs).
  • Précisez clairement l’aide que vous pouvez offrir et celle que vous ne pouvez pas offrir. (« Même si je ne peux pas vous offrir de service de consultation professionnelle, je peux vous rappeler pour faire un suivi si ça peut vous être utile. »)
  • Proposez de les aider dans le cadre des services offerts : « Je peux vous aider à mettre au point les étapes à franchir pour apprendre la nouvelle à d’autres personnes et pour permettre à votre famille et à vous d’avoir accès à des programmes d’aide et à des conseils professionnels. »
Aide-mémoire pour la postvention
Intervention immédiate
  • Notifier : Appelez l’ambulance et la police.
  • Contenir la crise : Assurez la sécurité dans l’immédiat. Prodiguez les premiers soins, demandez aux passants de s’éloigner et installez des obstacles visuels afin d’empêcher de voir le suicidé et les lieux sans déranger la scène pour l’enquête policière.
  • Recenser les moyens naturels d’aider ceux qui risquent de se suicider (victimes, témoins, famille, amis, employés et ensemble de la collectivité).
  • Aider les gens à avoir accès à l’information, aux ressources et aux recommandations dont ils ont besoin pour éviter de se sentir seuls.
Les 24 premières heures
  • Convocation : Convoquez l’équipe d’intervention d’urgence de votre organisme.
  • Communication avec les endeuillés : Si, en communiquant avec l’Unité de soutien aux victimes du Service de police d’Ottawa, le conseil scolaire ou d’autres organismes, vous constatez que votre organisme devrait communiquer avec la famille :
    • offrez vos condoléances;
    • expliquez la raison de votre appel;
    • proposez de l’aide;
    • renseignez-vous sur les parties prenantes qui pourraient être touchées elles aussi (comme l’équipe de hockey et l’établissement de travail) et;
    • confirmez les termes à employer pour parler du décès.
  • Informez les enfants, les adolescents, les jeunes adultes et les familles : Il faut le faire en connaissance de cause, en prenant des précautions et en étant attentif ou attentive. Un texte peut être utile. Adressez le message à de petits groupes. Il faut livrer un message cohérent à tous les enfants, adolescents et jeunes adultes. Ne parlez pas de la méthode employée pour le suicide. Si la famille le souhaite, ne parlez pas de suicide : parlez plutôt de décès. Dans ce cas, faites une déclaration plus générale, par exemple : « Un membre de notre ________ (club, communauté ou équipe) est décédé ».
  • Identifiez et épaulez les enfants, les adolescents, les jeunes adultes et les employés qui pourraient être touchés par le décès. Contactez et consultez les organismes voués à la santé mentale et qui peuvent offrir de l’aide dans cette phase. 
  • Répondez aux demandes des médias : Les représentants des médias pourraient vous contacter pour en savoir plus sur le décès. Avant de répondre, tâchez de savoir si d’autres organismes s’adressent déjà aux médias. Il est important de coordonner les réponses à apporter aux médias dans la postvention afin d’éviter les recoupements ou d’envoyer des messages contradictoires. Si votre organisme parle aux médias, assurez-vous que le porte-parole respecte ces pratiques, éclairées par des statistiques probantes.
  • Surveillez les réseaux sociaux : Le profil du défunt sur les réseaux sociaux pourrait constituer un point central de commémoration et de rumeurs. Encouragez les gens à penser aux sentiments des êtres chers dans leurs publications et demandez-leur d’inviter les autres à en faire autant. Il ne faut pas demander aux enfants, aux adolescents et aux jeunes adultes de surveiller les réseaux sociaux. Il faut toutefois leur faire connaître les messages qui peuvent causer du tort et leur dire qui contacter s’ils sont préoccupés par une publication.
La première semaine
  • Surveillance et aide : En collaboration avec les organismes voués à la santé mentale, continuez d’aider ceux qui pourraient être touchés.
  • S’il est opportun de le faire, planifiez la participation de votre organisme aux funérailles, par exemple en offrant des ressources dans le salon funéraire.
À plus long terme
  • Surveillance et aide : Continuez d’apporter de l’aide aux enfants, adolescents, jeunes adultes, familles et employés, de les surveiller et de leur faire les recommandations nécessaires.
  • Hommage : Pensez à planifier les anniversaires de naissance et autres ainsi que les événements importants. Veuillez consulter les règles de l’art (en anglais seulement) pour promouvoir la sécurité lorsqu’il s’agit de rendre hommage à la mémoire d’un suicidé.
  • Orientation : Établissez un plan de réaction dans la postvention pour le revoir dans le cadre du processus d’orientation des employés de votre organisme.
Pour aider les organismes à réagir après un suicide

Un aspect important des efforts consacrés à la prévention du suicide consiste à réagir efficacement en cas de décès par suicide. C’est ce que nous appelons la « postvention ». Il s’agit de la première étape à franchir dans les efforts de prévention continus. La postvention fait intervenir des stratégies prédéterminées pour réagir efficacement et délicatement au décès qui se produisent. Il s’agit de l’intervention qui répond aux besoins de ceux auxquels il faut offrir de l’aide lorsque quelqu’un s’est suicidé. Veuillez consulter les ressources ci-après à l’intention des organismes qui mènent une postvention.

Les lignes de conduite pour déclarer un suicide aux médias

La manière d’annoncer un suicide dans les médias peut avoir un impact retentissant sur ceux qui sont confrontés à des idées et à des sentiments suicidaires.

L'Association des psychiatres du Canada a publié le texte d'une politique sur les Lignes de conduite de la couverture médiatique du suicide. Dans ce document, l’Association recommande aux journalistes de respecter les règles de l’art suivantes :

  • évaluer l’intérêt journalistique de l’histoire et le besoin du public d’être informé malgré des dommages possibles en relation avec la contagion. Connaissez bien vos lignes directrices organisationnelles sur la couverture du suicide. Si vous décidez d’écrire votre article, prévoyez une manière de minimiser les dommages et/ou discutez-en;

  • solliciter les conseils des experts de la prévention du suicide. Usez particulièrement de précaution lorsque vous couvrez le décès par suicide d’une célébrité ou d’une jeune personne, car ceux-ci présentent les preuves de contagion les plus accablantes;

  • penser à la façon dont une personne vulnérable peut s’identifier au comportement suicidaire et à la personne décrite, et songer aux mesures à prendre qui peuvent minimiser cet effet;

  • considérer l’effet du reportage sur :

    • ceux qui pensent au suicide ou qui sont potentiellement à risque de se suicider;

    • ceux qui sont endeuillés par suicide, y compris l’attention au respect de leur confidentialité et de leur douleur;

    • le journaliste qui couvre l’histoire;

  • examiner l’approche ou le format approprié. La couverture du suicide devrait généralement se faire par des chroniqueurs de la santé plutôt que par d’autres journalistes (par exemple, chroniqueurs judiciaires), car ce sont les mieux placés pour contextualiser le sujet dans le domaine plus vaste de la santé mentale; si d’autres journalistes couvrent le sujet, ils devaient au moins consulter les lignes directrices et/ou leurs collègues de la santé.
  • Dans le mesure du possible, il est recommandé de rédiger un compte rendu détaillé, ce qui permet aux journalistes de nuancer leurs reportages et d’éviter de présenter de façon trop simpliste les causes du suicide.
  • Facteurs à prendre en compte pour les journalistes et rédacteurs en chef/producteurs avant de couvrir du contenu lié au suicide : Nous croyons que le décès par suicide de personnalités en vue résultera invariablement en une couverture en série, mais nous prions néanmoins les journalistes de mesurer le besoin de reportages additionnels.
  • Recommandations d’éléments potentiellement dommageables de la couverture médiatique à éviter et d’éléments potentiellement utiles à prévoir :
    • Éviter :
      • une couverture prédominante, incluant :
      • une couverture à la une/un article de tête;
      • des photos de la personne décédée ou de ses proches ou de personnes au comportement suicidaire;
      • des descriptions explicites ou sensationnelles;
      • des détails excessifs, notamment : des détails ou des photos de la méthode et/ou de l’endroit; évitez en particulier de rendre compte des méthodes innovatrices ou inusitées;
      • de glorifier ou embellir la personne ou le geste du suicide d’une façon qui peut en mener d’autres à s’identifier;
      • le contenu des notes de suicide;
      • une couverture répétitive ou excessive;
      • un langage inapproprié, notamment;
      • le mot « suicide » dans le titre;
      • « commettre » ou « a commis » un suicide;
      • réussi/manqué » ou tentatives « échouées »;
      • raisons simplistes ou superficielles du suicide (c’est-à-dire, attribuer le suicide à une seule cause ou un seul événement, comme blâmer les médias sociaux pour le suicide);
      • de donner une image du suicide comme étant l’atteinte de résultats ou la résolution de problèmes;
      • ne décrivez pas le comportement suicidaire comme étant rapide, facile, sans douleur, avec une mort assurée, ou libérateur de souffrance/menant à la paix (« dans un monde meilleur »).
    • Prévoir :
      • un langage approprié (par exemple, « il est mort par suicide » ou « son décès par suicide »);
      • une couverture qui réduit les stigmates sur les troubles mentaux et la recherche de soins de santé mentale, et qui remet en question les mythes répandus sur le suicide;
      • de faire référence à la recherche qui établit un lien entre troubles mentaux et suicide;
      • de souligner que les troubles mentaux sont traitables et donc que le suicide est évitable;
      • de parler de la tragédie du suicide (c’est-à-dire le décrire comme étant une occasion perdue pour une personne souffrante d’obtenir de l’aide);
      • de solliciter les conseils des experts de la prévention du suicide et penser à inclure des citations sur les causes et les traitements;
      • de solutions de rechange au suicide (c’est-à-dire, le traitement);
      • d’inclure de l’information sur les ressources communautaires, comme les sites Web ou les lignes directes, pour les personnes aux prises avec des idées suicidaires;
  • si possible, énumérer des options ou inscrire un lien à celles-ci, notamment se confier à un membre de confiance de la famille ou de la communauté, parler à un médecin ou un prestataire de soins de santé, chercher à consulter/parler à un thérapeute appeler une ligne directe/9-1-1, ou se rendre au service d’urgence le plus près;
  • si possible, de citer des exemples de résultats positifs d’une crise suicidaire (c’est‑à‑dire appeler une ligne d’assistance du suicide);
  • d’intégrer des liens/icônes de ressources d’urgence (pour le contenu en ligne);
  • de l’information pour parents et amis, comme :
    • les signes avertisseurs d’un comportement suicidaire;
    • les façons d’approcher, de soutenir et de protéger une personne suicidaire.

Veuillez consulter le site de l’Association canadienne pour la prévention du suicide afin de prendre connaissance d’autres recommandations sur les lignes de conduite à suivre en communiquant avec les médias.

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